
Conseil de la Métropole du 18 mars 2019
Intervention d’Émeline Baume
N° 2019-3397 – Modernisation de l’unité de traitement et valorisation énergétique (UTVE) de Rillieux la Pape – Individualisation totale d’autorisation de programme
N°2019-3398 – Rillieux la Pape – Marché public global de performance pour la modernisation et l’exploitation de l’unité de traitement et de valorisation énergétique (UTVE) de Rillieux la Pape – Autorisation de signer le marché de services à la suite d’une procédure concurrentielle avec négociation
Monsieur le Président, cher-e-s collègues,
En 1926, à Villeurbanne, la première usine à brûler le contenu des poubelles urbaines est apparue. Si le mouvement hygiéniste a fait beaucoup pour la salubrité urbaine, à court et moyen terme il a « tué » l’ensemble des réseaux de recycleurs locaux. Je vous invite à lire à ce sujet la littérature sur la Zone parisienne. La Zone était le territoire où ont été repoussés l’ensemble des collecteurs et recycleurs d’os, de cornes, de tissus, de papier, d’épluchures etc.
Depuis 1926, que de chemin parcouru avec un double usage de ces sites industriels :
- Le premier : diminuer le volume de nos déchets en les transformant en cendres et petites molécules glissées dans des gouttelettes d’eau. Vous noterez que ce n’est pas une disparition par la magie d’une combustion mais bien une diminution. Nous devons gérer les reliquats qui ne sont pas par essence « propres ». L’incinération zéro émission, zéro pollution n’existe pas. Les filtres et tous les processus de maturation n’enlèveront jamais le mercure, l’arsenic, le chrome. Ces substances sont néfastes pour l’air, l’eau, le sol, le vivant !
- Le second : fabriquer de l’énergie et ainsi proposer à un nombre certain d’habitant-e-s et d’usagers du chaud et parfois du froid à bas coût.
Projetons-nous maintenant dans l’avenir, un siècle après ce premier incinérateur : en 2026 (soit dans quelques années, à la fin du prochain mandat).
Les poubelles grises des habitant-e-s du territoire auront diminué de presque la moitié de leur volume parce que chacun-e trie le peu d’emballages ou de papier qui lui reste. En effet, depuis le 1er janvier 2020, tous les plastiques sont triés ! Dans le même temps, l’ensemble des lieux publics, des cafés et restaurants propose ce geste de tri pour recycler par exemple l’aluminium des canettes, renvoyer à la consigne ou recycler le verre. Les seules bouteilles en plastiques restantes sont en résine recyclée à 100 % et en France.
Par ailleurs, les déchets de préparation de repas des habitant-e-s retournent à la terre par compostage grâce à des sites citoyens et une collecte organisée de façon hebdomadaire. Ce compost mélangé aux terres excavées de l’ensemble de nos chantiers permet d’offrir une terre utilisable pour nos parcs, jardins et autres plantations incontournables pour rafraîchir notre cité. Les cantines et restaurants sont tous zéro gaspillage et l’ensemble de leurs biodéchets restants fabrique du biogaz en mélange avec nos boues de station d’épuration.
Enfin, tout le monde a dans son quartier un lieu de troc, réparation et partage d’objets utiles du quotidien y compris les vêtements. Pour terminer, nos déchetteries accueillent toujours les matériaux et gros objets qui sont soit recyclés en matières secondaires comme c’était déjà le cas en 2019, soit transformés sur notre territoire grâce à des réseaux de refabricants.
Tout ceci n’est pas une fiction, c’est la mise en œuvre volontariste du programme de prévention des déchets des habitant-e-s en cohérence avec la feuille de route amélioration du tri et la politique d’innovation sociale votés le 10 décembre 2018.
La fiction commence ici, nous sommes toujours en 2026 :
Depuis fin 2019 un Plan climat-air-énergie novateur ainsi qu’une stratégie alimentaire territoriale ont définitivement fixé ce cap de politique publique climat-compatible à l’échelle locale. Ce nouveau PCAET1 porte un objectif de limitation des gaz à effet de serre importés pour notre consommation et celles de nos entreprises au sens large du terme. Le territoire a fait le choix, en plus de produire des énergies renouvelables (avec le SDE2) et de largement rénover tous les bâtis (avec Écoréno’v), de s’attaquer à la circularité des matières et matériaux, ainsi qu’à la consommation responsable.
Pour les écologistes, cette fiction va devenir réalité, la consultation publique du PCAET commence, nous proposons ce volontarisme !
Pour revenir aux presque 23 millions d’euros pour continuer à faire vivre cet incinérateur le plus proprement possible tout en fournissant de la chaleur à certains Rilliards, c’est une étape. Ce n’est pas un aboutissement, car l’aboutissement sera une économie circulaire territoriale sans doute à l’échelle du Pôle Métropolitain, intense en activités économiques et en coopération de toutes sortes avec moins de fours d’incinération, l’argent public ayant été mobilisé pour accompagner la structuration de filières de réparation, refabrication, logistique urbaine, surcyclage et recyclage matière.
Pour les écologistes, c’est le dernier vote pour des fours d’incinérateur.
Merci de votre attention.
Seul le prononcé fait foi
1 Plan climat-air-énergie territorial
2 Schéma directeur des énergies