Conseil de la Métropole du 25 juin 2018
Intervention de Béatrice Vessiller
N° 2018-2842 – Elaboration du règlement local de publicité (RLP) de la Métropole de Lyon – Débat sans vote sur les orientations générales du RLP
M. le Président, cher-e-s collègues,
Nous devons nous prononcer sur les orientations du futur règlement local de publicité métropolitain qui s’appliquera sur tout le territoire en 2020.
Nous partageons plusieurs des orientations que vous nous proposez, comme la limitation de l’impact visuel de la publicité, notamment :
- Par l’interdiction des dispositifs en doublons, ou les publicités sur les murs de clôture…
- Par l’encadrement de la surface des panneaux traditionnels (8 m² au lieu des 12 m² autorisés aujourd’hui).
Sur ce point, la réduction est un progrès, mais nous pourrions aller encore plus loin avec une limitation à 2 m² – la taille actuelle des panneaux sur les bus – comme cela se fera dans le futur règlement de Paris.
Nous saluons l’augmentation de l’amplitude horaire d’extinction nocturne pour créer une « trame noire », afin de lutter contre la pollution lumineuse nocturne, consommatrice d’énergie et défavorable aux espèces végétales et animales qui ont besoin de la nuit noire.
Concernant la préservation du patrimoine urbain et paysager, nous souscrivons aussi à l’attention à accorder aux quartiers « ordinaires », en plus des sites patrimoniaux les plus remarquables (AVAP1, secteur sauvegardé, monuments historiques et abords). En effet, nous sommes favorables à une réduction de la publicité partout, et pas seulement dans les quartiers déjà protégés de la publicité, car chaque Grand Lyonnais aspire à vivre dans un cadre de vie de qualité et sans invasion publicitaire.
En revanche, sur la question des enseignes lumineuses et numériques, nous trouvons votre proposition de limiter et d’encadrer leur développement bien trop timorée, au regard des enjeux de santé publique, de modération énergétique, voire de sécurité routière. Nous sommes totalement opposés aux « écrans publicitaires vidéos » :
- C’est un affichage plus agressif que l’affichage papier : avec leur luminosité et leurs images en mouvement, ils captent notre regard et sans doute s’imposent-ils encore plus à nous. De ce fait, ils sont source de stress et de fatigue supplémentaire pour tous, particulièrement pour les enfants.
- C’est bien évidemment un gaspillage énergétique, en totale contradiction avec les engagements de notre Plan Energie Climat Territorial, et avec nos objectifs d’une consommation sobre autant que maîtrisée.
- Enfin, c’est dangereux pour la circulation, car ces écrans publicitaires animés attirent le regard des conducteurs de voitures et diminuent leur vigilance : le risque de collisions et d’accidents est donc accru. Plusieurs études l’attestent déjà.
C’est pourquoi nous souhaitons que notre futur règlement interdise la publicité dite « numérique » sur l’espace public de l’ensemble de la Métropole.
Nous avons bien saisi qu’il y a un débat sur le financement des Vélo’v électriques grâce à la publicité sur écran numérique. Reconnaissez, cher-e-s collègues, qu’il y a ici un peu de perversion à mettre en balance le développement d’un service permettant une moindre utilisation de véhicules polluants, avec le développement de ces écrans qui, eux, polluent les cerveaux ! Nous sommes bien sûr favorables à l’introduction de Vélo’v électriques et favorables à ce que leur financement soit assuré par d’autres recettes que celles des panneaux numériques. C’est un choix politique que nous avons à préparer d’ici la mise en place de ce service de vélo-partage en 2020.
Soulignons enfin que la publicité nuit dangereusement aux commerces de proximité – ceux-ci sont connus des habitants dans leur quartier. En effet, elle profite le plus souvent aux grandes enseignes et aux grandes surfaces de périphérie, celles-là même qui vident les centres-villes, qui nécessitent des déplacements en voiture et qui éloignent les habitants de leur lieu de vie, de lieux de rencontres propices aux échanges et à la vie de quartier.
Vous l’aurez compris, nous souhaitons un cadre de vie de qualité et apaisé dans l’ensemble de la Métropole, où la place de la publicité doit être réduite drastiquement, où les habitants, et en particulier les enfants, ne seront plus considérés comme des consommateurs sollicités à chaque pas ou chaque tour de roue, pour acheter tant et plus, tel produit dérivé, tel nouveau produit alimentaire (qui plus est, chargé en sucres, en gras ou en sel…) ou tel produit cosmétique, sans compter les images sexistes, ou les clichés de femmes-objets que comportent de nombreuses publicités… C’est pourquoi nous sommes favorables à ce que le futur règlement stipule que tout ce qui n’est pas autorisé est interdit, afin de prévenir toute nouvelle innovation que pourraient proposer les publicitaires, dans les prochaines années.
A la publicité envahissante, préférons des aires de jeux, des arbres, des fresques, des œuvres d’art, de l’information culturelle, citoyenne, ou de la collectivité, voire rien à la place de la publicité !
Un certain directeur d’une chaîne de télé avait dit en son temps « vendre du temps de cerveau disponible à Coca-Cola ». Eh bien, en tant que collectivité, ne transformons pas notre espace public, ce bien commun, en « espace de cerveau disponible aux annonceurs » : usons de notre pouvoir de dire non aux écrans numériques !
Je vous remercie.
Seul le prononcé fait foi
1 Aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine