Conseil de la Métropole du 25 juin 2018
Intervention de Béatrice Vessiller
N° 2018-2787 – Avis de la Métropole de Lyon dans le cadre de la procédure de consultation sur le projet régional de santé (PRS) Auvergne-Rhône-Alpes 2018-2028
M. le Président, cher-e-s collègues,
Le PRS a fait l’objet d’une consultation sur 3 mois jusqu’en avril et a été approuvé le 15 juin dernier mais l’Agence régionale de santé a permis que la Métropole donne un avis hors délais.
Même si nous sommes hors délais et sans certitude que nos remarques soient prises en compte, notre groupe tient à s’exprimer sur ce dossier. Le plan évoque le renforcement de la démocratie sanitaire, mais il n’a pas fait l’objet lui-même d’un grand débat citoyen avec les Auralpins, et nous le regrettons, car un tel cadre d’actions concerne bien la santé de tous, des plus jeunes aux plus âgés, mais aussi toutes les personnes vulnérables, dont les personnes en situation de handicap, mais aussi la santé environnementale, l’éducation et la sensibilisation, l’accès aux soins, le maillage territorial… Autant de sujets qui intéressent toute la société, surtout dans la période actuelle, après les débats autour de l’impact du glyphosate sur la santé, période où l’Europe somme la France de respecter les normes de qualité de l’air, où les personnels de santé sonnent l’alerte dans les services d’urgence, les EHPAD1, ou encore dans les déserts médicaux, encore hier avec cette lettre ouverte des médecins qui craignent d’être bientôt « en situation de non-assistance à personnes en danger » !
Eh bien, ce plan ne donne pas de réponses à ces situations de dysfonctionnements structurels, à force d’économies demandées depuis de nombreuses années, d’une approche très comptable des gouvernements successifs, avec notamment la tarification à l’acte, alors que nous avons besoin d’une approche globale de la santé de la personne, plus que de la découper en pathologies spécifiques. Les moyens sont insuffisants sur la prévention et l’éducation, alors même que, malgré les moyens très élevés consacrés au curatif, des problèmes importants subsistent en matière d’inégalités sociales et territoriales de santé, de provocation ou d’aggravation des pathologies, car on ne s’attaque pas assez aux causes telles l’exposition aux oxydes d’azote, aux particules, aux COV2, aux pesticides, aux produits d’épandage… Sur ces questions de santé environnementale, le plan renvoie au plan régional de santé environnement (PRSE), mais celui-ci est peu contraignant et peu engageant.
Sur de nombreux points, le plan fixe de grandes orientations auxquelles nous pouvons souscrire, comme la réduction des inégalités territoriales, l’accès aux soins pour les plus précaires, les plus fragiles… Mais il ne donne aucune indication sur les moyens qui seront alloués, pour mener à bien toutes les actions recommandées : où, quand, comment, combien ? Quels moyens financiers et humains ? Rien de tout cela, ni même dans les indicateurs proposés dans l’évaluation.
- Les inégalités territoriales sont surtout vues entre les départements d’Auvergne-Rhône-Alpes. Sans nier ces disparités, il faut traiter des disparités au niveau infra-territorial : au sein de notre métropole, la présence médicale, l’accès aux soins, l’exposition à un environnement non favorable à la santé sont très disparates entre nos communes ou entre les quartiers d’une même commune. Les quartiers en politique de la ville sont moins bien lotis et leurs habitants y sont en moins bonne santé que sur la moyenne de la métropole. Nous souhaitons des actions sur ces territoires, centres de santé ou autres, mais aussi en matière de réduction de l’exposition au bruit et à la pollution à proximité des grandes voiries, d’aide à une alimentation de qualité pour réduire la prévalence du diabète et de l’obésité chez les personnes à revenus modestes… ;
- Pour les personnes âgées, le plan régional propose de reconfigurer les ressources gérontologiques : mais comment peut-on penser qu’une réorganisation, si utile soit-elle, suffira à pallier la manque de places en EHPAD, ou encore de moyens pour l’accompagnement à domicile, pour aider les aidants et agir contre la solitude, et plus en amont encore, contre l’usure au travail…?
- Pour les personnes en situation de handicap, comment le plan va-t-il, dans les faits, réellement faciliter l’accès aux soins de ces personnes, favoriser la scolarisation en milieu ordinaire des enfants en situation de handicap ou encore favoriser l’accès à une qualification et à l’emploi…?
- Pour améliorer l’accès aux soins psychiatriques, le plan vise d’« optimiser le fonctionnement des centres médico–psychologiques », avec une « attention particulière à l’accès des jeunes enfants, des personnes handicapées et des personnes en situation de précarité ». Très bien mais comment faire mieux avec moins, quand la psychiatrie est un des secteurs qui a le plus souffert ces dernières années ?
- Dernier exemple, là encore en matière de santé environnementale, le plan prévoit des actions de sensibilisation et d’éducation des enfants, des adolescents et des parents aux risques (ventiler les espaces de vie, veiller aux produits d’entretien, aux pesticides, exposition au soleil, risques liés à l’écoute de la musique amplifiée). Nous adhérons à ces actions mais qui réalisera ces actions éducatives, quand les postes de médecine scolaire se réduisent, alors que pourtant, leurs missions devaient porter sur ces questions mais aussi sur l’éducation à l’alimentation saine, au sommeil, à la prévention des addictions de tous ordres, à la sexualité… ? Pour conclure, nous insistons sur les enjeux de politiques publiques d’urbanisme, de mobilité, d’environnement, pour réduire significativement les atteintes à l’environnement qui ont un fort impact sur la santé.
En l’état, le projet régional de santé ne peut nous satisfaire. C’est pourquoi nous nous abstiendrons et resterons force de proposition pour les prochaines étapes.
Je vous remercie.
Seul le prononcé fait foi
1 Etablissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes
2 Composés organiques volatils